Qualifié pour la finale du CNIC 2014 grâce à son classement au terme de la saison des tournois de Poker Panache Association, Nonopilote nous offre le compte rendu de son tournoi.

Bon, on va tenter de vous faire un peu "inside" du CNIC 2014 avec du poker, bien sûr, mais pas seulement.

Tout commence avec un train mais à la rigueur, ce n’est pas intéressant. Arrivé à Narbonne, ça devient plus fun. D’abord parce qu’il y a pas de taxi. Un numéro de tel, un gars répond, "je suis là dans 20 minutes !" dit-il. 2 gus se foutent à l’arrêt de taxi, le voilà qui arrive, je fais valoir mon droit de préséance, ils me disent qu’ils ont réservé aussi !! Effectivement, le chauffeur demande qui va à Gruissan, qui va à Narbonne Plage ? OK, players spotted, je suis sûr de retrouver les 2 gus demain. La bonne nouvelle, c’est que ça me coutera moins cher, et c’est tant mieux, parce que 80 euros de course, ça commence à faire mal. Je m’en tire pour la moitié.

A Narbonne plage, je récupère les clefs de l’appart, et j’entame la mission. Oui, la mission, parce que mon appart est situé dans une résidence qui compte pas moins de 20 bâtiments, un vrai labyrinthe, en travaux pour ne rien gâcher donc avec tous les numéros de bâtiments enlevés, et dans le noir parce que la nuit est tombée !
Au bout de 30 minutes, enfin, je rentre dans une cage à lapin (propre certes) et je me mets en devoir de faire mon lit. Mais où sont ces putains de couvertures. Je finis par foutre un miteux couvre lit à peine matelassé, et passerais une nuit de merde à moitié gelé. Bilan ce matin, ben j’ai une bronchite.
L’avantage d’une nuit de merde, c’est que t’es levé tôt, d’autant plus tôt qu’avec des fenêtres plein-est et des rideaux en papier à cigarette, t’as pas besoin d’allumer la lumière à 6h du matin.

Petite douche tranquille, on est sorti à 7h45 pour aller se prendre un café croissant à la boulangerie du coin, en attendant que la superette ouvre pour faire quelques petites emplettes. J’ai besoin d’un sac à dos, et faut que je loue un vélo, je fonce donc à St Pierre de la Mer, un village à 4 km à l’est de Narbonne plage, pour aller au marché, j’en reviendrai avec une musette, et en auto stop, l’occasion de tester la pertinence de ce moyen de transport. Comme ça marche, je décide de squeezer le vélo et de tenter l’aller-retour à Gruissan (10 bornes) de la même façon.

Et c’est parti pour attaquer la marche vers l’olympe.
Après un bon kilomètre sans toucher un seul petit cœur d’automobiliste, un toulousain s’arrête et me propose de me faire un bout de chemin, 5km quand même, jusqu’à un supermarché où il va. C’est déjà ça de gagner, et en plus c’est un joueur, alors on discute poker.
Je continue mon chemin et à peine 500m plus loin, c’est une famille qui s’arrête, pour me permettre de faire 3km supplémentaires. Il ne me reste que 300m à faire pour atteindre le Saint des saints, et me voilà à attendre l’ouverture du reg. Un petit coucou à Cindy et Actarus, je retrouve mes 2 compagnons de Taxi, quelques visages déjà vu mais sur lesquels je ne mets pas de nom, et on attend le moment fatidique : on tire la table ! (et là, vous vous dites : "enfin du poker !!")

Ma table :

Je suis au siège 7 et je vais partir de ce point pour décrire un peu les joueurs.
Le siège 8 ne devrait pas me poser de problème vu qu’il n’est pas là. Par contre, nouveauté, on ne retire pas les joueurs absents, les stacks tournent jusqu’à épuisement.
En siège 9, un vieux joueur assez typique du livetard. Il ne sait pas lâcher ses mains, et surjoue trop souvent, il perdra 2 gros coups dont un facilement évitable dans les petites blindes, et se retrouve à peine à 3k dans les 3 premiers niveaux, il finira par sauter avec AK vs JQ sur un flop hauteur Q, et s’il trouvera son roi à la turn, le J de la river le crucifiera sur place.
En 10, c’est un joueur de Douai, il ne me parait pas fort, mais surtout, il parle trop ! Pas sur la conversation en général, il est plutôt sympa, mais il donne trop d’infos sur son jeu, et ça lui jouera des tours (mais moins qu’à moi si on va par-là).
En 1, ça ressemble au joueur compétent élevé à l’internet, un jeu créatif, imprévisible, couillu, je vous raconterai 2 coups complètement fous qu’il a joués.
Le siège 2, j’hésite entre l’ultra aggro et le joueur qui rush, il ouvrira à un moment quasiment 2 mains sur 3 et ne devra qu’à un bon set up des familles de se faire pacifier (par le siège 1 justement).
Le siège 3 a le même profil, semble également compétent, et subira la loi du 1. Si on regarde bien, autant mon virage était soft, autant ce virage pue la mort !
En 4, c’est un gars du Taxi, il joue pour Kellerman, il vit un désert de cartes et semble assez rarement toucher son flop, en plus, bien qu’en position sur les 3 premiers, il subit surtout leur loi, ainsi que celle du 5 : LE joueur à abattre de la table. Il est qualifié internet, compétent, agressif (il relance son bouton les 3/4 du temps) avec une range d’open assez large. On se fritera souvent, et jamais en carnaval... Malheureusement pour moi. Le siège 6 est ultra tight, il ne jouera que très peu de coup, et bien sûr avec du monstre à chaque fois. Forcément, personne n’ira le chercher.

Quelques coups assez folklo :

Le siège 1 est super actif au départ, et voici deux mains assez fantasques qu’il va jouer.
Le 1er l’oppose au 3, on est sur les blinds 25/50, et le 1 ouvre à 125 en MP. Le 3 relance à 350, tout le monde couche, et 1 complète. Le pot fait 775. flop, AJx, avec 2 piques. Le 1 mise 650 en 2 barrels, et 3 paye. Pot 2075. Turn J, pas de pique. 1 3-barrel, 1300, et 3 tank, puis paye. Le pot fait 5675. On est au 2e niveau, avec des stacks à 10K, et les 2 joueurs sont encore full stack ou au-dessus. La river est une brique. 1 envoie une praline à 3500, et finalement 3 jette. 1 claque un T7s à carreau en total bluff !!! 3 est complètement assommé après ce coup et ne sera plus aussi actif après.
2e coup, 1 est au cut off, et 5 ouvre, sur des blinds 100/200, à 525. Fold général, et 1 surrelance à 1350. le boutons et les blinds s’écartent, et 5 4-bet à 3150. 1 annonce tapis, il couvre largement 5.
Celui-ci paye après une courte hésitation, et table KK, tandis que 1 ne montrera pas mieux que.... J8s !!! _ Après ce coup, 5 passe à 20K, tandis que 1 qui avait bien volé, revient au tapis de départ.

Mon jeu :

Après quelques coups sans montrer mes mains, je montre une image plutot tight, mon jeu habituel.
Arrivé à la pause, où j’ai le plaisir de parler avec notre responsable des interclubs (nino), je reviens avec un peu plus de 11k, au-dessus de la moyenne. Au démarrage du niveau (150/300), on est 4 à table, dont le siège 5... Et je suis au bouton, sachant que 8 (forcément) et 9 (qui a été remplacé) ne sont pas là. 5 relance à 625, après les fold des 2 autres joueurs, et je trouve ATs à cœur au bouton. Je call. Le flop est un pur baby avec que des cartes sous le dix, dont deux cœurs. Ma lecture du joueur est qu’il ouvre tous les broadway, suited ou non, les Ax, toutes les paires, sans doute les connectés, assez peu les suited. Il mise 625 en Cbet. Fort de mon tirage cœur et de 2 overs, je call. La turn est une pure merveille, c’est le J cœur. Ça touche sa range, et je suis max. Il check, et je slowplay, pour lui donner l’occasion de bluffer, je check. La river est une belle brique, mais contrairement à ce que je pense, il check encore. Je ne peux que miser en value, et j’envoie une petite mise à 1500, des fois qu’il lui prenne l’envie de C/C voire mieux, de C/R. Il finit par fold.
A la main suivante, c’est encore mieux, car si mon aggro mise à 625, je découvre cette fois ci AA ! Vu l’historique, j’aurais peut-être du juste call, mais je relance, à 1300, et après un fold général, il call. le flop tombe, 225 dont 2 piques. Je pense que je commets une erreur, parce qu’il essaye de prendre le lead, avec une mise de 1500 alors que, dans ma lecture, il n’a que très rarement un tirage couleur, aucun 2, et surtout pas de 5. Et au lieu de caller, ce qui aurait été le move le plus efficace, je relance à 3200. Bien sûr, il couche. Je lui montre ma main, et sa réflexion montre bien que j’ai fait une erreur préflop, et que ma relance montrait trop de force. Je le paye sans doute sur le coup qui me sortira.

Lors d’un troisième coup, toujours contre lui, je découvre cette fois A2, et, alors que je jette d’habitude cette main, je call car 80% de sa range d’ouverture en late position ne comprends pas d’A (et on verra par la suite que même en UTG, il ouvre finalement assez large). Le flop tombe, A28 rainbow, et fort de ma double paire, j’attends son cbet. Qu’il fera. Mais il faut vraiment que j’apprenne à refreiner mon jeu, car, encore une fois, au lieu de caller, et de le laisser tirer une carte qui ne changera rien pour moi, je le relance, et trouve un fold.

La main qui me sort :

5 est UTG et ouvre à 800 sur les blinds 200/400 ante 50. Je découvre AKs et décide de faire une relance à 2000, ce qui est peut être une erreur puisque c’est le genre de main qui aime le monde à défaut d’aimer les flops.
Tout le monde couche et 5 réfléchit, puis paye (je pense que c’est d’une part parce qu’il couche rarement sa main ici, et d’autre part, que l’historique entre nous peut lui laisser penser que je relance plus large contre lui). Le flop tombe KQ4 rainbow. Il mise 2000 que je relance à 5000. Et je me prends direct son tapis dans la tronche après une courte hésitation. Ma première réaction sera de lâcher un « putain ! » bien audible.
A ce moment-là du coup, je suis à un peu plus de 15 000 ce qui me laisse 8k derrière soit 20 blinds (pas plus de 21). Sa mise polarise sa main, et la première évidence qui me vient est qu’il a QK. Il ne peut avoir ni KK, ni QQ, car il m’aurait relancé préflop, et la troisième carte est trop faible pour avoir suivi préflop. De son côté, vu notre historique, il peut me voir sur AA, AK, et AQ, puisqu’il est peu probable que j’ai KK ou QQ vu qu’il a deux bloqueurs dans la main. C’est donc un fold évident, et c’est d’ailleurs ce que me dit mon cerveau droit, siège de la reflexion. Mais j’écoute en fait mon cerveau gauche, celui de l’égo, et je pousse ma pile de jeton pour découvrir ma lecture parfaite : il a bien KQ (so obvious diront certains).

Fin du CNIC 2014 pour moi, je repars avec un petit paquet cadeau comprenant un jeu de carte, un stylo, un jeton commémoratif, une lanière de cou, et beaucoup de frustration. Pour mes camarades de jeu, je ne connais pas la suite, le joueur Kellerman sautera en fin de journée, pour les autres, je n’en sais rien. Si, le gars de Douai ira jusqu’à la table finale !

Le reste de mon WE se passera entre balade et resto, mais même si Narbonne plage est agréable, tout seul c’est franchement chiant.

Pour finir, le CNIC est quand même une expérience à vivre, avec une situation de jeu qui n’a rien à voir avec le club (tournoi en casino, croupiers, ambiance, etc…) L’équipe qui organise est très pro, même si les conditions de jeu par certains côtés n’étaient pas top (une salle un peu petite, et pour la clim, c’est pas ça) mais rien à dire côté humain. La structure du tournoi est pas top, il faut écrémer 400 joueurs en 2 jours, autant dire que passer les 8 premiers niveaux, ça tourne vite à la boucherie. Mais c’est à vivre quand même, et je ne regrette pas d’y être allé, même si je n’ai pas très bien représenté l’asso.

Bonne chance pour nos représentants l’année prochaine !!